Déremboursement du Hyalgan dans le traitement de la gonarthrose : les raisons jugées irrecevables pour le Syndicat

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L’annonce de déremboursement du Hyalgan, acide hyaluronique utilisé dans le traitement de la gonarthrose, est tombée. La solution viscoélastique sera déremboursée à partir du 1er décembre 2017 (voir parution au JO du 12 octobre). La décision laisse place à l’incompréhension chez les rhumatologues qui redoutent les conséquences de ce nouveau déremboursement pour leurs patients arthrosiques.

Le Ministère des Solidarités et de la Santé pointe un « manque d’efficacité » des acides hyaluroniques dans le traitement de la gonarthrose qui, rappelons-le, touche des millions de patients en France. La décision de déremboursement invoque, entre autres, que les données cliniques d’efficacité disponibles sont insuffisantes pour établir une efficacité réelle du médicament concerné, contrairement à la décision de la Haute Autorité de Santé qui accorde un service médical rendu faible, mais non insuffisant au Hyalgan, ce qui en général permet de conserver un remboursement à 15 %. La raison principale est en fait d’aligner le Hyalgan, médicament, sur les dispositifs d’acide hyaluronique injectables déjà déremboursés.

De nombreuses initiatives ont été menées pour contrer cette décision de déremboursement de toute la classe des acides hyaluroniques injectables dans l’arthrose du genou :

– la pétition « Stop-arthrose » menée par l’AFLAR qui a collecté plus de 400 000 signatures,

– la lettre ouverte envoyée à Mme Agnès Buzyn le 8 juin dernier dans laquelle le SNMR demandait une « remise à plat » du dossier avec une analyse actualisée des données épidémiologiques et de la littérature,

– la lettre ouverte au Président de la République parue dans Le Monde du 9 septembre 2017.

Cette décision de déremboursement implique, et même conseille selon les termes de l’arrêté, le recours à des traitements plus iatrogènes et moins efficaces comme les Anti-Inflammatoires Non Stéroïdiens (AINS), les antalgiques, ou encore le recours plus tôt à la prothèse totale, ce qui entrainera une augmentation sans précédent du nombre de prothèses posées.

De plus, une étude publiée dans Annals of Internal Medicine démontre que l’effet-taille sur la douleur des injections d’acide hyaluronique est supérieur à celui des AINS, alors que ces derniers sont plus dangereux pour l’estomac et peuvent déclencher une insuffisance rénale chez le sujet âgé ou des complications cardiovasculaires. La balance bénéfice/risque est donc largement favorable aux injections d’acide hyaluronique par rapport aux anti-inflammatoires.

Il semblerait que le ministère s’appuie sur deux recommandations relatives à la prise en charge de l’arthrose (les guidelines de traitement du National Institute for Health and Care Excellence [NICE] à destination des praticiens britanniques et de la société américaine de chirurgie orthopédique [AAOS]) qui sont très discutées. Cette dernière société, dont le conflit d’intérêt est évident au vu du coût d’une prothèse de genou aux USA, a d’ailleurs modulé ses recommandations sur son site.  On peut ainsi noter qu’aux États-Unis, le recours à la prothèse de genou est 2,2 fois plus fréquent qu’en France. L’incompréhension continue sur le plan médico-économique lorsqu’il est question du coût que va engendrer la pose de prothèses de genou (11 000 € par intervention quand tout se passe bien) face à l’utilisation des acides hyaluroniques, susceptible de retarder voire d’éviter cette pose.

Le SNMR se mobilise face à cette nouvelle annonce de déremboursement du Hyalgan, qu’il juge irrecevable face aux raisons invoquées par le Ministère des Solidarités et de la Santé. Il s’agit d’une décision purement politique pour des économies à court terme, qui ne tient pas compte de l’avis de la Haute Autorité de Santé ni de la littérature récente, ayant conduit à un simulacre de consultation alors que la décision était déjà prise dès la mise en route de ces évaluations. À terme, le déremboursement de tous les acides hyaluroniques injectables dans la gonarthrose aura des conséquences irréversibles pour les millions de patients qui en souffrent, en plus d’un important surcout pour l’Assurance Maladie, qui balaiera les économies supposées à court terme.

Dr Eric SENBEL,
Président du Syndicat National des Médecins Rhumatologues